Suspendu entre ciel et calcaire, le sangle du Pinet est l’un de ces chemins qui n’oublient pas de nous rappeler que la montagne est un art de l’équilibre. Ni tout à fait randonnée, ni tout à fait escalade, il offre une traversée inoubliable dans l’âme verticale de la Chartreuse.
Une signature géologique de la Chartreuse
Dans le massif de la Chartreuse, les sangles sont des vires naturelles, sortes de balcons creusés dans les falaises calcaires au fil du temps et de l’érosion. Ils dessinent des lignes presque parfaites à flanc de montagne, reliant parfois des lieux que l’on penserait inaccessibles. Le sangle du Pinet est l’un des plus beaux de ces itinéraires suspendus.
Autrefois utilisés par les bergers et les chasseurs, ces sentiers confidentiels séduisent aujourd’hui les randonneurs en quête de solitude et d’émotions fortes, loin des sentiers battus. Ici, chaque pas nous rapproche d’un autre rapport au vide, à la lenteur, à la nature brute.
Accéder au sangle du Pinet
L’accès le plus courant démarre au parking de la Plagne, au-dessus de Saint-Pierre-d’Entremont. On s’élève d’abord en forêt, sur un sentier frais et moussu, jusqu’au col de l’Alpette puis la cabane du même nom, charmante clairière nichée au pied des falaises. Là, l’ambiance change. La pente s’adoucit, la forêt se clairsème, et déjà la montagne semble vouloir vous montrer ses parois.
Il faut alors suivre le sentier balisé, qui longe à mi-parcours une petite paroi dans une combe. On débouche hors de la forêt, le sommet n’est plus qu’à quelques minutes.
Une traversée au bord du vide
Le sangle du Pinet se découvre d’un seul regard : une vire horizontale, suspendue au-dessus du vide, s’étirant à perte de vue sous les à-pics calcaires. Par endroits large d’un mètre, ailleurs à peine plus qu’une trace, il exige un pied sûr, du calme, et l’absence totale de vertige.
À gauche, la falaise vous pousse doucement vers l’extérieur. À droite, c’est le vide qui s’ouvre jusqu’au fond de la vallée. Mais très vite, l’appréhension laisse place à la fascination. Les vues sont spectaculaires : au-delà des bois et des falaises, se dessinent les crêtes du Mont Outheran, la masse du Granier, et parfois, par beau temps, les contours du Mont Blanc.
C’est un lieu de silence. Seuls les cris des chocards et le souffle du vent viennent troubler la quiétude. On marche doucement, concentré mais émerveillé. C’est un de ces moments où le corps est pleinement là, sans projection ni passé, juste présence.
Au sommet du Pinet
Au terme du sangle, un sentier plus classique vous conduit au sommet du Pinet (1 867 m). De là-haut, la Chartreuse s’étale comme une mer de crêtes et de forêts. Au sud, la Dent de Crolles et les Lances de Malissard. À l’est, les cimes effilées de Belledonne. En contrebas, les grandes forêts de Saint-Hugues et les entailles profondes des gorges du Guiers.
C’est un sommet discret, sans croix ni foule. On y reste volontiers un long moment, allongé dans l’herbe, à écouter les insectes et les pensées passer.
Infos pratiques
Départ : Parking de la Plagne (Saint-Pierre-d’Entremont).
Dénivelé : Environ 900 m D+ pour la boucle complète.
Difficulté : Randonneurs expérimentés. Le sangle est exposé, non sécurisé, parfois glissant.
Matériel recommandé : Chaussures à semelle rigide, carte IGN ou application GPS, casque (conseillé).
Période idéale : Mai à octobre, hors neige et temps humide.
Temps estimé : 5 à 6 heures pour la boucle (montée par le Habert, retour par le col de l’Alpe possible).